intervalle – Sam & Max http://sametmax.com Du code, du cul Wed, 30 Oct 2019 15:34:04 +0000 en-US hourly 1 https://wordpress.org/?v=4.9.7 32490438 Union d’un ensemble d’intervalles http://sametmax.com/union-dun-ensemble-dintervalles/ http://sametmax.com/union-dun-ensemble-dintervalles/#comments Sun, 17 Feb 2013 06:42:43 +0000 http://sametmax.com/?p=4572

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Kikoo amis matheux ou pas. Aujourd’hui, on va se faire un petit algo de derrière les fagots. Vous n’en aurez peut-être jamais besoin dans le monde réel, mais, qui a dit qu’on allait se contenter uniquement de ce dont on a besoin ? De plus, je présenterais, à la fin, une astuce générique d’algorithmiciens.

Pré-requis

  • Connaître très vaguement la notion des O(n²), O(truc), … qui définissent le temps d’exécution d’un algorithme en fonction de la quantité de données à traiter. (Si ça vous parle pas c’est pas grave).
  • Savoir que le pluriel d’intervalle n’est pas “intervaux”.

Petite précision : pour définir des intervalles d’entiers, j’emploierais la convention pythonienne : le dernier élément n’est pas inclus. C’est à dire que [2, 7] correspond à 5 éléments : 2, 3, 4, 5, 6.

Énoncé

Soit une liste de couple de nombres, représentant des intervalles. Ils sont tout en vrac, y’en a qui se chevauchent, d’autres qui s’inclusent, etc. Bref, l’ensemble fait penser à une partouse animale multi-espèces.

exemple : [ [2, 7], [3, 7], [1, 5], [9, 10], [8, 9] ]
Les crochets d'intervalles ont une tronche bizarre. C'est pour bien montrer que le dernier élément n'est pas inclus.

Vous voulez une méthode pour rassembler tout ça, et obtenir une liste d’intervalles, triée, sans chevauchement, correspondant à la fusion de tous les intervalles de départ. En maths, on appelle cette opération une union. En partouse animale multi-espèces, on appelle aussi ça une union, mais ce n’est pas le sujet.

résultat souhaité : [ [1, 7], [8, 10] ]
Toujours cet éternel problème de nombre de poteaux versus nombre d'intervalles. Je suis sûr que si on était dans un univers non-eucliden on serait pas emmerdé avec ce genre de détail à la con.

Solutions auxquelles on pense en premier

Le bourrin pas-à-pas

On récupère le début d’intervalle le plus à gauche, et la fin la plus à droite. On boucle entre ces deux valeurs. À chaque itération, on effectue le traitement suivant :

  • Vérifier si la valeur courante est dans au moins un intervalle.
  • Si oui, et que juste avant on était dans aucun intervalle, alors on marque cette valeur comme un début d’intervalle.
  • Si non, et que juste avant on était dans au moins un intervalle, alors on marque cette valeur comme une fin d’intervalle.

Désavantages

Si, au départ, on a deux intervalles très éloignés, par exemple [0, 2] et [1000000, 1000002] on va faire une boucle de 1000002 itérations. Pour traiter 2 intervalles, c’est un peu lourd.

Ça ne marche qu’avec des entiers. Si on a des intervalles de réels, on itère comment ? En avançant de 0.0000000001 en 0.0000000001 ? Même problème avec des intervalles de date-heure.

Le bourrin cumulatif

On crée une liste géante de booléens, tous à False, qui s’étend du premier début d’intervalle à la fin du dernier. Chaque booléen indiquera si le nombre correspondant se trouve dans au moins un intervalle. On met les bons booléens à True en parcourant les intervalles de la liste initiale. Puis, on construit la liste finale d’intervalles, en se basant sur les booléens.

Désavantages

Si on a en entrée un million de fois l’intervalle [10, 210], on va mettre un million de fois à True la même suite de 200 booléens. 200 millions d’opérations pour ressortir un unique intervalle [10, 210].

Même problème que précédemment. Ça ne marche qu’avec des nombres entiers.

Du bourrin et du cumulatif : serait-ce l'occasion d'invoquer une grand-mère à moustache ?

L’enfileur de perles

On a d’un côté la liste finale des intervalles (initialisée à vide), et de l’autre, la liste initiale, en bordel. On passe les intervalles d’une liste à l’autre, un par un, en testant les cas suivants :

  • Le début et la fin de l’intervalle en cours n’est dans aucun intervalle final -> ça fait un nouvel intervalle final.
  • Le début est dans un intervalle final, mais pas la fin -> ça rallonge l’interval final existant.
  • La fin est dans un intervalle final, mais pas le début -> ça rallonge l’intervalle final existant, mais par l’autre côté.
  • La fin et le début sont dans le même intervalle final -> l’intervalle en cours ne sert à rien.
  • La fin et le début sont dans deux intervalles finaux différents. -> il faut fusionner les deux intervalles finaux.

Et en plus de tout ça, il faut également tester s’il n’y a pas des intervalles finaux entièrement inclus dans l’intervalle en cours. Auquel cas, ils ne servent plus à rien, et doivent être enlevé de la liste.

Désavantages

Une bonne grosse prise de tête à coder tous les cas possibles, sans rien oublier, sans bug.

Le fait de chercher si un nombre se trouve dans une liste d’intervalles, fut-elle triée, est une opération qui prend un certain temps. Ça peut s’optimiser avec de la dichotomie ou des trucs du genre, mais quand même.

Par contre, cette algo marche avec des nombres réels et des date-heure. Youpi.

Je pige même pas comment ce jouet est censé fonctionner. Faut mettre les perles dans le trou de la machine ? Comment le trou de perle se met en face du fil ? Est-ce que ça serait pas encore plus galère qu'à la main ?

Et si on arrêtait les conneries ?

Dans ces premières solutions, on considère les intervalles comme des objets immuables. Il faut en traiter un entièrement avant de passer au suivant. Mais on peut aussi les voir comme deux événements distincts (un début et une fin), que l’on peut dissocier totalement, et traiter dans leur ordre d’arrivée. On ne sera plus capable de retrouver quel début correspond à quelle fin, mais ça on s’en fout, y’a rien qui ressemble plus à un intervalle qu’un autre intervalle.

Imaginez un petit bonhomme (ou une petite bonne femme, respectons la parité). Au départ, il est au niveau du sol. Il avance vers la droite. Quand il rencontre un début d’intervalle, il monte sur un mur d’un étage. Quand il rencontre une fin, il descend d’un étage. Il peut être sur plusieurs étages superposés. Au fur et à mesure qu’il se déplace, on note les endroits où il se retrouve sur le sol. Ces endroits correspondent à des zones sans aucun intervalle.

Je vous laisse retrouver de quel jeu vidéo est tiré ce screenshot. Je l'avais beaucoup aimé. Je trouvais l'univers très onirique, et très "compte de fée mais pas cucul, parce que y'a quand même dedans des aventures qui poutrent de la rascasse particulaire avec un chandelier dans la véranda."

Mes parents n'arrêtaient pas de me dire que mes jeux se ressemblaient tous. Puis ils m'emmenaient visiter des églises et des châteaux qui se ressemblaient tous. Bizarre...

Le code

def tri_bonhomme_sur_un_mur(list_intervalle_en_bordel):
    """ Effectue une union de tous les intervalles indiqués en paramètre.
    
    Données d'entrée : une liste de liste de deux éléments, représentant
    des intervalles.
     - Le type des éléments n'est pas imposé. Il faut juste qu'on puisse 
       les ordonner et les trier. 
     - Dans chaque liste de deux éléments, le premier doit être plus 
       petit que le second. 
    La fonction ne vérifie pas ces contraintes. Si elles ne sont pas 
    respectées, le comportement est indéterminé. Ça peut planter, 
    ça peut renvoyer un résultat faux sans avertissement, etc.
    
    Sortie : une liste de liste de deux éléments, unionnisée et triée
    comme il faut.
    """
    # On extrait tous les débuts d'intervalles, et toutes les fins.
    list_debut = [ interv[0] for interv in list_intervalle_en_bordel ]
    list_fin = [ interv[1] for interv in list_intervalle_en_bordel ]
    # On les trie, pour pouvoir les traiter de gauche à droite.
    list_debut.sort()
    list_fin.sort()
    # Cette liste contiendra les intervalles unionnisés et triés.
    list_intervalle_final = []
    # indique le nombre d'invervalle superposés dans lesquels on se trouve
    # actuellement. (C'est à dire : le nombre d'étages sur lequel
    # marche le bonhomme).
    nb_superposition = 0
    # Lorsqu'on est dans un ou plusieurs intervalles superposés, on doit
    # se souvenir à quelle position on est entré dans le premier.
    # Cela permettra de créer l'intervalle final, lorsqu'on sera 
    # complètement sorti de la superposition en cours.
    debut_intervalle_courant = 0
    
    # C'est parti ! Le petit bonhomme avance. On lui fait traiter les
    # événements d'entrée et de sortie d'intervalle au fur et à mesure 
    # qu'ils arrivent.
    while list_debut:
        # Le premier élément de list_debut, c'est le premier début 
        # d'intervalle qu'on rencontrera. Le premier élément de list_fin,
        # c'est la première fin d'intervalle qu'on rencontrera. On 
        # détermine, parmi ces deux événements, lequel on rencontrera en 
        # tout premier.
        #
        # La fonction cmp renvoie -1, 0, ou 1, selon la comparaison 
        # effectuée entre les deux valeurs passées en paramètre.
        # Faire un petit help(cmp) pour connaître les détails.
        ordre_debut_fin = cmp(list_debut[0], list_fin[0])
        if ordre_debut_fin == -1:
            # L'événement rencontré est un début d'intervalle.
            # On enlève l'événement de la liste, puisqu'on va le traiter,
            # là, tout de suite.
            pos_debut = list_debut.pop(0)
            if nb_superposition == 0:
                # On était dans aucun intervalle, et on vient d'en 
                # rencontrer un. Dans la liste finale d'intervalles, 
                # ça va donc compter comme un début. On retient 
                # cette info.
                debut_intervalle_courant = pos_debut
            # Dans tous les cas, on ajoute une superposition d'intervalle
            # (le bonhomme monte d'un étage).
            nb_superposition += 1
        elif ordre_debut_fin == +1:
            # L'événement rencontré est une fin d'intervalle.
            # On l'enlève de la liste.
            pos_fin = list_fin.pop(0)
            # On enlève une superposition d'intervalle.
            nb_superposition -= 1
            if nb_superposition == 0:
                # Après avoir enlevé la superposition, on se retrouve
                # avec 0 intervalle superposé. 
                # (Le bonhomme est redescendu jusqu'au niveau du sol).
                # Il faut donc enregistrer ça comme une fin d'intervalle 
                # final. Tant qu'on y est, on crée tout de suite ce nouvel
                # intervalle final et on le met dans la liste.
                nouvel_intervalle = (debut_intervalle_courant, pos_fin)
                list_intervalle_final.append(nouvel_intervalle)
        else:
            # On rencontre à la fois un début et une fin d'intervalle.
            # Rien de spécial à faire. Faut juste virer les 2 événements 
            # traités de leur liste respectives.
            list_debut.pop(0)
            list_fin.pop(0)
    
        # Durant toute cette boucle, la variable nb_superposition augmente
        # et diminue. Mais elle n'est jamais censée devenir négative.
        # Si ça arrive, c'est que les données d'entrées sont mal foutues.
        # On entre dans un cas d'indétermination. 
    
    # Arrivé à la fin de la boucle, il peut rester, ou pas des éléments
    # dans list_fin. Ce qui est sûr, c'est que list_debut se vide
    # avant list_fin. Si ce n'est pas le cas, c'est encore un cas
    # d'indétermination.
    
    if list_fin:
        # On a passé tous les débuts d'intervalle, mais il reste des
        # fins. Ça veut dire qu'on est encore dans un ou plusieurs
        # intervalles. On devrait normalement avoir :
        # len(list_fin) == nb_superposition. Si c'est pas le cas, c'est
        # un cas d'indétermination.
        #
        # On pourrait traiter les événements de fin d'intervalle un par un,
        # et diminuer progressivement nb_superposition. Mais on s'en fout,
        # c'est pas nécessaire. On prend juste la fin d'intervalle qui 
        # supprimera la dernière superposition (c'est à dire la dernière
        # fin d'intervalle), et on construit un dernier intervalle final
        # avec ça.
        pos_fin = list_fin[-1]
        nouvel_intervalle = (debut_intervalle_courant, pos_fin)
        list_intervalle_final.append(nouvel_intervalle)
    
    return list_intervalle_final

Les avantages (parce que y’a aucun désavantages)

Ça marche avec des réels, des dates, et de manière générale, tout ce qu’on peut trier.

>>>tri_bonhomme_sur_un_mur([ [2, 7], [3, 7], [1, 5], [9, 10], [8, 9] ])
[(1, 7), (8, 10)]

# Testez pas ça chez vous ! Ça prend trois plombes ! Mettez juste 1000.
>>>tri_bonhomme_sur_un_mur( [ [10, 210], ] * 1000000 )
[(10, 210)]

# Voyons voir ce que ça donne avec des réels 
# (dont certains sont négatifs, tant qu'à faire).
>>>tri_bonhomme_sur_un_mur([ 
    [-7.2, -6.9], [-8.4, -5.3], [-10.5, -5.25], 
    [-1.7, 0.01], [0.0, 4.0], 
    [12.125, 13.9, ], [13.9, 15.0]])
[(-10.5, -5.25), (-1.7, 4.0), (12.125, 15.0)]    
    
# et avec des dates
>>>from datetime import datetime
>>>tri_bonhomme_sur_un_mur([
    [datetime(2012, 12, 21, 16, 54), 
     datetime(2013, 02, 16, 12, 59)], 
    [datetime(2013, 02, 14, 2, 0), 
     datetime(2069, 01, 01, 13, 37), ] ] )
[(datetime.datetime(2012, 12, 21, 16, 54),
  datetime.datetime(2069, 1, 1, 13, 37))]                           

En ajoutant à peine 2-3 lignes de code à la fonction, on peut récupérer le nombre maximal d’intervalles superposés.

En re-ajoutant quelques autres lignes, on peut récupérer les zones dans lesquelles ce maximum est atteint. Ce qui pourrait servir pour effectuer l’opération mathématique d’intersection. (Je vous laisse chercher ça par vous mêmes).

L’algorithme est principalement constitué d’une bi-boucle, c’est à dire une boucle unique, qui avance dans deux listes différentes (je viens d’inventer ce terme, ne m’embêtez pas). C’est encore plus simple que deux boucles imbriquées. Le nombre d’itérations à effectuer est égal au nombre d’intervalle multiplié par deux, c’est tout. Dans tous les cas limites présentés ci-dessus, ça fait une solution acceptable, demandant un temps d’exécution peu pharaonique.

Exemple de deux bi-boucles imbriquées au niveau de la vis. Cette image vous a été offerte par les Scissor Sisters.

Mais ou est passé la complexité ?

Les premières solutions avaient l’air de demander énormément de temps d’exécution, surtout avec beaucoup d’intervalles en entrée. Ça ne semble pas être le cas pour la solution du “bonhomme sur un mur”. Pourtant, la complexité d’une tâche, ça ne disparaît pas comme par magie. Y’aurait-il une entourloupe quelque part ?

Il y en a une. Ce sont les deux opérations de tri effectuées au début de la fonction. Un tri, ce n’est pas anodin, et son temps d’exécution peut augmenter très beaucoup et très vite. La complexité n’a pas disparue, on n’a fait que la déplacer vers des tris. Alors finalement, ma solution n’est pas si bien que ça ?

Eh bien si. Parce que le tri, même s’il reste coûteux en temps et en ressource, est un problème archi-connu, archi-réglé, et archi-optimisé. Le python, comme beaucoup d’autres langages, profite pleinement du travail réalisé par des centaines de matheux algorithmologues, qui se sont masturbés l’esprit sur des centaines de méthodes de tri différentes.

Y'a des fois, on sait que l'image dont on a besoin ne sera pas trouvable sur l'internet. Alors on est obligé de la créer soi-même. (Mais je me suis fait aider).

Photo prise dans le bureau d'un chercheur en algorithmologie.

C’est ça l’astuce générique dont je vous parlais au début. Face à un nouveau problème, le matheux sort son zguègue tente de trouver des équivalents à un ou plusieurs problèmes connus, que lui et ses amis matheux ont déjà réglés. C’est souvent bien plus simple que de tenter de régler le problème directement, en partant de rien.

“Un nain éjacule bien plus loin lorsqu’il est perché sur les épaules d’un géant.” Et pour respecter la parité, j’ajouterais qu’une naine femme-fontainise bien plus loin lorqu’elle est perchée sur les épaules d’une géante.

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